*Règlement intérieur modifié : l’Assemblée nationale affine son fonctionnement et muscle ses outils de contrôle*
Adoptée le mardi 8 juillet 2025 à Porto-Novo, la révision du règlement intérieur du Parlement béninois marque un tournant technique et stratégique dans la gouvernance institutionnelle de la 9e législature.
Par *Pascal Sègbégnon MITOWADE*
Sous la présidence de Louis Gbèhounou Vlavonou, les députés ont entériné en séance plénière une nouvelle version de leur règlement intérieur, désormais mieux arrimée aux exigences d’une législature moderne et proactive. La résolution n°2025-02 réorganise non seulement la machine interne du Parlement, mais renforce aussi ses leviers de contrôle, d’influence législative et de transparence budgétaire.
*Une réforme d’ingénierie institutionnelle*
Ce texte, fruit du travail de la Commission des lois, ne se contente pas d’ajustements formels. Il opère un profond réaménagement juridique et procédural, visant à sécuriser les actes du Parlement, encadrer la vie des élus, et garantir une lecture rigoureuse des lois et engagements. Parmi les points saillants :
L’ancrage juridique des cérémonies de début de législature, souvent sujettes à des lectures variables ;
La clarification des modalités de démission ou de renonciation d’un député, un sujet sensible au regard de la discipline partisane ;
L’inclusion directe des dispositions relatives aux lois organiques sur la HAAC et le CES, pour éviter toute zone grise d’interprétation.
*Des avancées notables en matière de gouvernance*
La réforme introduit un pouvoir renforcé aux questeurs, bras financiers du Parlement. Désormais, ils contrôlent la conformité de toutes les dépenses, paraphe les actes de liquidation budgétaire et encadrent l’engagement des ressources. C’est une réponse directe aux attentes de transparence financière, dans un contexte régional de plus en plus exigeant sur l’usage des deniers publics. Autre avancée majeure : l’internalisation des procédures de marchés publics à l’Assemblée nationale, avec un cadre clair pour la passation et le suivi, réduisant ainsi l’opacité et les soupçons souvent associés à ces opérations.
*Une reconnaissance institutionnelle pour les femmes parlementaires*
Le nouveau règlement crée officiellement le Caucus des femmes parlementaires du Bénin, désormais inscrit à l’article 39 quater. C’est une avancée symbolique et politique, qui consacre l’organisation collective des élues autour de la promotion du genre, de l’équité et de la législation sensible aux enjeux féminins.
*Le Conseil économique et social mieux intégré*
Le texte affine également les relations entre le Parlement et le Conseil économique et social (CES). Il précise les conditions dans lesquelles le CES participe aux travaux parlementaires, expose ses avis ou intervient sur les projets de loi à fort impact socio-économique. Deux membres du CES pourront siéger, sans voix délibérative, dans les commissions permanentes, apportant ainsi une expertise technique souvent nécessaire.
Le rapport du CES, présenté en plénière à la demande du gouvernement, n’est pas soumis au débat mais inspire les travaux parlementaires, renforçant ainsi le dialogue entre les deux institutions.
*Des propositions retoquées, mais un cadre renforcé*
Certaines demandes comme l’augmentation du nombre de commissions permanentes ou l’élargissement du Bureau parlementaire n’ont pas été retenues. Un signal que cette réforme n’est pas un chèque en blanc, mais une refonte ciblée sur l’efficacité, la lisibilité et la cohérence institutionnelle.
*Une réforme stratégique plus que symbolique*
Avec cette révision, l’Assemblée nationale ne cherche pas seulement à moderniser ses textes. Elle tente de s’autonomiser dans sa gestion, de rationaliser ses mécanismes internes et de se repositionner comme un véritable contre-pouvoir organisé, capable de suivre, contrôler et anticiper les grandes transformations économiques et sociales du pays.
À l’heure où la confiance citoyenne envers les institutions dépend aussi de leur capacité à fonctionner de manière rigoureuse et responsable, ce nouveau règlement intérieur s’impose comme un outil de légitimité démocratique.
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